La perception de l’identité de genre dans la voix enfantine en langue française. Le rôle de la fréquence fondamentale et autres paramètres fréquentiels


Date : 2022
Auteur : Lou JULLIEN
Directeur(s) de mémoire : Laurent Millot & Erwan Pépiot

Son

Résumé : L’élaboration, dans l’imaginaire collectif, de représentations de ce que sont les « voix de garçon » et les « voix de fille », par analogie avec les voix adultes, relèvent de problématiques complexes et pluridisciplinaires. Nous avons cherché à étudier dans ce mémoire les tenants et les aboutissants phonétiques et psychoacoustiques de cette question. Nous y abordons les différences intergenres dans les voix enfantines en langue française et posons la question du processus d’identification du genre des enfants par l’écoute de leur voix. Le premier chapitre est consacré à un état des lieux de la recherche sur l’expression et la perception du genre à travers la voix. Le deuxième chapitre décrit la collecte et l’analyse d’un corpus de voix d’enfants, nommé CoVEP, composé de 10 filles et 8 garçons francilien·ne·s âgé·e·s de 8 à 10 ans. Le corpus est constitué d’une série de 33 pseudo-mots dissyllabiques et de 12 phrases lues avec un mode de phonation normal et avec une voix chuchotée ; ainsi que d’un extrait de discours semi-spontané d’une trentaine de secondes avec un mode de voix normal. Nous présentons l’analyse des F0 des enfants sur l’ensemble du corpus. Les garçons présentent en moyenne des F0 plus basses que celles des filles, cette différence ne s’est avérée significative que pour l’extrait du discours semi-spontané des enfants. Une partie des enregistrements effectués a été utilisée dans le cadre d’un test perceptif. 44 adultes ont été chargé·e·s d’identifier le genre de 8 des filles et 8 des garçons enregistré·e·s à partir d’une sélection de pseudo-mots dissyllabiques et de phrases voisés et chuchotés. La confrontation de stimuli identiques, voisés et chuchotés nous a permis d’évaluer l’impact de la F0 sur les réponses données par les participant·e·s. Les auditeur·ice·s ont produit un nombre de bonnes réponses supérieur à la chance pour tous les types de stimuli. Les phrases ont permis de mieux identifier le genre que les stimuli courts. Les stimuli voisés ont été mieux identifiés en moyenne que les stimuli chuchotés ce qui indique que la F0 joue un rôle dans la perception du genre des voix pré-pubères. Nos résultats laissent penser qu’il existe bel et bien une différence de F0 en fonction du genre en langue française, dès 8 ans. D’après notre étude bibliographique, ces résultats ne s’expliquent pas par une différence morphologique de l’appareil vocal avant la puberté, l’explication de cette observation est probablement d’ordre culturel. Enfin, il semble que les adultes sont capables de reconnaître le genre des enfants à la seule écoute d’une phrase mais le rôle de la F0 et des paramètres acoustiques utilisés pour identifier le genre restent à déterminer.

 

Mots-clés : Genre, voix d’enfant, perception du genre dans la voix, traitement de la parole, socio-phonétique, psychoacoustique

 

 

Abstract: The collective representations of what « boy voices » and « girl voices » are, by analogy with adult voices, raise complex and multidisciplinary issues. In this thesis we have sought to explore the phonetic and psycho-acoustic implications of the matter. We address the gendered differences in French children’s voices and seek to understand how one is able to identify the gender of children only by listening to their voices. The first chapter is devoted to an overview of research on the expression and perception of gender through the voice. The second chapter describes the collection and analysis of a corpus of children’s voices, named CoVEP, made up of 10 girls and 8 boys aged 8 to 10 from the Ile-de-France region in France. The corpus consists of a series of 33 dissyllabic pseudowords and 12 sentences read with both normal and whispered voices ; as well as a 30-second semi-spontaneous speech extract with a normal voice. We present the analysis of the children’s F0 over the whole corpus. The boys’ F0s were lower on average than those of the girls, but this difference was only significant for the semi-spontaneous speech extract. Part of the recordings was used in a perceptual test. 44 adults were asked to identify the gender of 8 of the recorded girls and 8 of the recorded boys from a selection of dissyllabic pseudowords and sentences both voiced and whispered. The confrontation of identical voiced and whispered stimuli allowed us to evaluate the impact of F0 on the responses given by the participants. The listeners produced a number of correct responses higher than chance for all types of stimuli. Sentences were better identified than short stimuli. Voiced stimuli were better identified on average than whispered stimuli, indicating that F0 must play a role in the perception of the gender in pre-pubescent voices. Our results suggest that there is indeed a difference in F0 as a function of gender in French as early as 8 years old. According to our literature review, these results cannot be explained by a morphological difference in the vocal apparatus before puberty. The explanation for this observation may be cultural. Finally, it seems that adults are able to recognise the gender of children by listening to a sentence, but the role of F0 and other acoustic parameters used to identify gender remain largely to be determined.

 

Keywords: Gender, child voice, gender perception, gendered acoustic differences, voice perception, speech processing, French, phonetics, sociophonetics, psychoacoustics

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